http://franceolympique.com/art/5364-le_medicosport-sante_voit_le_jour_!.htm

http://faemc.fr/sites/default/files/pdf/medicosport-sante_light.pdf

La conférence des Directeurs STAPS (C3D) se réjouit que le Comité National Olympique Français (CNOSF) soit engagé sur la question de la pratique d’activités sportives des malades chroniques et que le mouvement sportif puisse être force de proposition pour des personnes dont l’état de santé et les ressources cognitives, psychologiques et culturelles le permettent.

Elle se satisfait qu’en cohérence avec les recommandations du PNAPS concernant la prévention tertiaire, le mouvement sportif (mais pas seulement) puisse accueillir des personnes autonomes et formées à pratiquer une APS avec leur condition chronique.

La C3D reste cependant très étonnée par le positionnement du CNOSF dans le médicosport-santé sur plusieurs points :

– la démarche scientifique unipartenariale avec la SFMES exclut d’autres sociétés savantes travaillant historiquement sur les pratiques d’Activité Physique Adaptée des malades chroniques et qui, s’appuyant sur des laboratoires universitaires dans différentes disciplines scientifiques, produisent des connaissances indispensables à une approche holistique ;

– la production d’un outil d’aide des médecins pour l’orientation du patient atteint de maladie chronique à partir de la seule offre fédérale, excluant ainsi les associations sportives de patients et les associations d’activités physiques adaptées ;

– une « réflexion » sur les compétences des intervenants qui ne dit mot des compétences en APA-S qui se sont pourtant révélées très utiles au développement du Sport –santé en milieu fédéral. Les étudiants diplômés en APA-S ont été recrutés par les fédérations pour contribuer à ce développement dès la première heure : pourquoi ne pas faire apparaître leurs compétences dans ce manuscrit ?

– des projets de formation Sport-Santé qui ne disent mot sur les formations universitaires en APA-S et sur leur apport dans la réflexion globale ;

– un flou sur l’usage des connaissances physiopathologiques par les éducateurs sportifs dont on se demande comment ils peuvent les maîtriser à partir d’une formation aussi courte. Les propositions des fédérations posent de ce point de vue des questions professionnelles et éthiques. Qu’est-ce qui saurait justifier qu’un éducateur sportif s’immisce dans la gestion de la santé des pratiquants ? Ne risque-t-on pas de considérer les pratiquants comme des patients ? La formation des éducateurs Sport-santé leur permet d’engager un dialogue, à la demande des pratiquants exclusivement, sur les conditions de sécurité de leur pratique. Mais ce sont les personnes qui connaissent leur condition chronique qui gèrent leur pratique en fonction de leurs capacités. Elles ne doivent en aucun cas se retrouver dans la situation d’être prise en charge par l’éducateur sportif.

– in fine, la C3D souhaite interroger la conception même de l’APA qui sous-tend la démarche. Comme le suggèrent les discours dominants qui sont médiatisés autour du sport sur ordonnance, l’AP semble porteuse de valeurs intrinsèques qui produisent leur effet à partir de la simple mise en exercice. Cette perspective a invité principalement les médecins à comparer l’activité physique à un médicament, les amenant à centrer leurs recherches sur l’évaluation de ses effets sur la santé. Il ne s’agit pas pour les enseignants en APA d’appliquer un cahier des charges de recommandations d’activité physique pour mettre les patients en exercice en contrôlant leur sécurité. Il s’agit de se saisir de l’expérience de l’APA comme une opportunité non seulement de protection de la santé, mais de développement des ressources individuelles des patients dans un projet de participation sociale qui ait du sens pour eux et qui contribue à un projet de vie avec la maladie. N’est-ce pas ce qui permet le passage du sport pour tous au sport pour chacun ?

En résumé, à la lecture du médicosport-santé, la C3D découvre un processus et des propositions conçues indépendamment des formations universitaires en STAPS (si deux enseignants chercheurs et un docteur en STAPS figurent parmi les auteurs, ils ne semblent pas endosser un statut d’acteur collectif).

L’Etat (et les contribuables) financent des formations universitaires en APA-S qui s’appuient sur une activité de recherche et sur une expérience de plus de 30 ans. Leur qualité est contrôlée selon une procédure d’évaluation rationnelle via l’HCERES. Ces formations qualifient de jeunes étudiants qui se sont investis durant 3 à 5 années et qui sont aujourd’hui sur le marché de l’emploi.

Il est ici prévu, indépendamment des diplômes professionnels existants et de leurs garanties de qualité, de créer de nouvelles formations destinées aux acteurs des fédérations. Ces derniers sont invités à développer des compétences d’encadrement de pratiquants atteints de maladie chronique, alors même que cela n’a jamais fait partie de leur projet initial.

En poussant les éducateurs sportifs dans un secteur qui ne les concerne qu’à la marge tout en ignorant les compétences en APA-S, ne court-on pas au gaspillage du bien public ?

Par ailleurs, quel pourrait être le sens d’une base de données destinée aux prescripteurs libéraux pour l’orientation de leurs patients vers une pratique sportive, qui ne comprendrait que les propositions du mouvement sportif cautionné par la médecine du sport ?

Ces questions de la Conférence des directeurs STAPS interrogent la politique globale d’orientation des malades chroniques vers une pratique d’activité physique adaptée.